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samedi 19 novembre 2011 à 14h

2 parties : 1 2

Réunion du club "socialisme maintenant"

Cher(e) camarade

Afin de permettre au maximum de personnes d'y participer, nous avons décidé de repousser la réunion mensuelle de notre Club au

samedi 19 novembre à 14h précises, Librairie " L' Emancipation " 8 Impasse Crozatier (Croisement rue des Citeaux et rue Crozatier) Métro Faidherbe Chaligny ou Gare de Lyon.

Nous vous faisons parvenir ci-joint quelques notes pour engager la discussion; N'hésitez pas à faire parvenir vos réactions ou contributions. En première partie une camarade tunisienne nous fera part de son appréciation de la situation après le résultat des élections en Tunisie. Enfin nous vous ferons parvenir avant la réunion

1) Le rapport (actualisé) sur la crise économique de Robert Rollinat.
2) L'introduction à la discussion de notre dernière réunion d'octobre de Emile Fabrol.

Notes pour le débat

Voilà des décennies que les militants de tradition marxiste ou indépendants scrutent l'horizon de l'histoire : analyse de l'état du monde, de la montée des périls, mise en exergue de telle ou telle lutte exceptionnelle. Ce faisant, lucidement, les mêmes constataient l'ampleur des défaites mondiales consacrées en 1989 par la victoire de la coalition oligarques russes-capitalistes occidentaux détruisant pierre sur pierre, jusqu'au souvenir de la Révolution d'Octobre.

Cette débâcle a permis à la contre-révolution, sur tous les continents, d'accéder.

A partir de la fin des années 70, quelques intellectuels, quelques militants ont commencé à analyser le libéralisme comme nouvelle expression du système capitaliste. De fait, l'analyse a toujours retardé sur les conséquences de l'offensive libérale contre les exploités, classes et peuples confondus. Les défaites ont succédé aux échecs.

Dévitalisant le prolétariat des pays avancés par la délocalisation systématique, mise en concurrence des classes ouvrières entre elles, désintégration totale de toutes les conquêtes sociales, explosions du chômage, etc. Jamais la violence sociale ne s'est exercée à l'échelle du globe avec une telle persévérance. Quasiment planifiée, l'offensive pouvait marquer le pas dans ce pays, elle progressait sur l'ensemble du reste du front.

Ajoutons que le libéralisme n'est pas limité à une démarche économique ou financière. Il faut que ça tienne ! Et pour ce faire, les maîtres de la mondialisation ont bâti un système mondial, total, intervenant en temps réel, qui à chaque moment matraque les opinions, fournit des explications. Fiction, publicité, propagande forment un tout qui produit en permanence le spectacle positif de la société. Un véritable programme ! La barbarie n'a jamais été aussi sensuelle, conquérante, jeune, attrayante. Les maitres du monde instruits par l'histoire savent qu'à l'échelle du globe, l'ordre des prédateurs doit éviter autant que faire se peut l'utilisation de l'armée. La répression passe aussi par la télévision, les médias modernes, les systèmes d'éducation, de formation.

De surcroit, cette communication est rentable.

Combien de fois avons-nous pensé, après tel ou tel événement : ça ne tiendra pas… Ca tenait. Au point que depuis 20 ans au moins, chaque crise économique financière semblait régénérer le système qui tel un phénix revivait en permanence de ses cendres.

L'offensive libérale, depuis le coup d'état de Pinochet a ravagé la planète. Partout où il y a eu résistance, combat, partout au bout du bout, les masses ont perdu la bataille, le chômage a explosé, la paupérisation s'est installée, banalisée, la pauvreté bat des records en Europe et aux Etats-Unis. Les sans toits sont maintenant des centaines de milliers et nombreux sont ceux qui ne peuvent plus se soigner !

Hier, la barbarie c'était ailleurs, encore loin. Maintenant sans exagérer, c'est ici. Par leurs seules forces, les salariés, défaits, démoralisés, sans imaginaire politique, (encadrés par des appareils politiques et syndicaux affaiblis mais très présents pour défendre l' ordre social, accompagner et aider à la mise en place de ces contre réformes et défaites), ne sont pas en mesure de combattre avec une chance sérieuse de l'emporter sur un système organisé mondialement (Europe, FMI, Alena, ONU, OTAN, etc).

Un système politiquement centralisé. Les sommets européens, les réunions du G7 du G20 n'ont qu'une fonction. Coordonner les politiques libérales sur tous les continents.

Mais depuis 2008 (crise des subprimes), une nouvelle situation politique s'écrit sous nos yeux. Le salariat, la classe ouvrière internationale n'y sont pas pour grand-chose (même s' il y a débat et nuances entre nous sur ce point). Les militants révolutionnaires encore moins…

Le système économique, financier, politique bâti depuis 1980 commence à s'effriter, à s'effondrer. Ce n'est ni une berlue ni une exagération. En particulier l'Europe implose.

Ici le toit glisse, là les murs se fissurent... La panique boursière, les peurs financières (stabilité des banques) impuissantent les gouvernants. A peine annoncent-ils un accord laborieux qu'il est remis en cause !

Avec la crise de la dette souveraine, le système commence à prendre l'eau. L'incroyable se réalise. Même pour nous. Nous avons si longtemps scruté l'avenir sans rien apercevoir, que là nous sommes sur le retrait. Annulation de tout ou partie de la dette grecque ! et déjà les « marchés » lorgnent du côté de l'Italie… L'Euro peut sauter disent les « experts. » Les gouvernements européens ne parviennent pas à juguler l'hémorragie. Tout le système se craquèle. L'unité du commandement n'est plus. Les intérêts anglais, français, allemands et américains s'opposent.

C'est dans cette situation que salariés et jeunes peuvent relever la tête. Ils doivent se battre car évidemment le système capitaliste ne peut faire payer la situation qu'aux opprimés. La crise des sommets ne déclenche pas automatiquement une contre-offensive mais elle la rend possible. (C'est ici bien sûr que nous devons mesurer et analyser la portée des révolutions initiées cet hiver en Tunisie, Egypte etc… et aussi le mouvement des « indignés » de ce printemps, un ensemble hétérogène et différencié dont la dimension et l' apport font débat aussi entre nous : en quoi bouscule t il nos convictions et/ou les conforte t il?)

Ce n'est pas une crise économique de plus.

Ce n'est pas une crise politique supplémentaire.

Une nouvelle époque commence. Si les principaux bateaux de l'armada libérale ont des avaries, peuvent s'échouer ; si l'avalanche de la dette souveraine écrase les institutions financières internationales, la question d'un nouvel ordre contre ce désordre va être posée. Peut-être que le cycle de près de 40 ans de stabilité libérale s'épuise…

Ce n'est pas une affaire revendicative ou syndicale.

Nous sommes les 99 % disent les Indignés. Et c'est dans la citadelle de la mondialisation, aux Etats-Unis, que ce mouvement semble prendre tout son sens.

Ce que je trouve exceptionnel, ce qui à mon avis annonce peut-être une nouvelle période et non pas un simple, classique « tournant », c'est que la crise mondiale du capitalisme pose à des millions de femmes et d'hommes, une question simple.

- Si ce système, cette économie, ces modes de gouvernements, conduisent à de tels cataclysmes alors il faut débattre d'un autre monde. Tout de suite. Maintenant. Hors de quoi nos enfants, nos petits-enfants sont condamnés à la Barbarie.

Il me semble que la question d'un processus révolutionnaire : conquérir le présent pour garantir l'avenir est posé. Il me semble que ce sont ces problèmes qu'il faut mettre au cœur de nos discussions.

Un mot encore. Les événements grecs annoncent la politique que le prochain gouvernement de François Hollande mettra en œuvre. Tous les candidats des primaires socialistes ont soutenu, loué, Papandréou.

Ne nous racontons pas d'histoires. Evitons d'en raconter. La « victoire » de Hollande sera une défaite électorale de Sarkozy. Certainement pas une victoire des salariés. Discutons-en !

Lien : https://paris.demosphere.net/rv/18948
Source : message reçu le 4 novembre 18h


Grèce Sthatis Kouvelakis

Documents: Pour préparer notre réunion du 19 novembre 14H précises Librairie l' Emancipation 8 Impasse Crozatier Paris 12è

Pour Stathis Kouvelakis, spécialiste de la Grèce, la situation politique intérieure grecque est hors de contrôle. Interview.

En l'espace d'à peine trois jours, le Premier ministre grec, Georges Papandréou a semé une confusion politique sans égal à force de rebondissements. Quel est l'état d'esprit de la population grecque ?

- La séquence politique, qui s'achève vendredi soir, a plongé le pays dans l'"ingouvernabilité" totale. La Grèce plonge dans le chaos. Cette impression, je la ressens dans les rues d'Athènes : un commerce sur trois est fermé, les quartiers sont sombres, une grande partie du centre-ville est devenue relativement dangereuse.

La volonté, même passagère, de Georges Papandréou, de leur donner l'occasion de s'exprimer par voie de référendum n'a pas apaisé les tensions ?

- Au départ, il y a eu un effet de surprise. L'élément démocratique a été surtout perçu comme une occasion donnée pour exprimer le rejet de la population envers leur gouvernement. Dans la situation actuelle, si le gouvernement avait tenu n'importe quel référendum avec n'importe quelle question, la réponse aurait été "non". Les taux d'approbation de ce gouvernement oscillent entre 5 et 10 % dans les derniers sondages. Les médias étrangers n'ont pas pris la mesure de l'ampleur de ce rejet depuis un an et demi, comme ils n'ont pas pris la mesure de l'état de la révolte et de la sécession.

On l'a vu lors de la fête nationale du 28 octobre, événement tragique passé presque inaperçu en France. Le chef de l'Etat a été éjecté de la tribune de la cérémonie officielle par une foule en colère. Une foule qui a ensuite occupé la tribune et devant laquelle les contingents civils ont défilé en liesse, chantant des slogans de la résistance et de la lutte contre la dictature. Vous imaginez des choses équivalentes en France ? Ce sont des scènes avec une portée symbolique très forte.

C'est ce qui a d'ailleurs poussé Georges Papandréou à organiser un référendum...

- Cet événement a été l'élément déclencheur en effet. Il était déjà soumis à une forte pression après le vote du 20 octobre qui portait sur toute une série de mesures extrêmement dures de réduction de salaires et de hausses d'impôts. Il a joué son va-tout après le 28.

Mais l'éventualité de ce référendum n'aurait pas pu servir de soupape au ras-le-bol des Grecs...

- L'un des buts de Georges Papandréou était en effet d'offrir un moyen d'expression institutionnel, de canaliser le mécontentement quitte à prendre le risque d'un non. Il voulait désamorcer l'aspect le plus explosive et le plus incontrôlable des manifestations de rue.

Est-ce tenable ? Je ne pense pas. Des seuils symboliques de protestation ont été franchis. Ce qu'il faut comprendre c'est que 80 % des Grecs ne savent pas comment ils vont boucler leur budget de novembre. Les taxes ont été multipliées par 10 ! Les élèves n'ont toujours pas de manuels scolaires depuis la rentrée. Cela n'est pas arrivé depuis la libération. Dans les hôpitaux, on demande aux patients d'aller chercher eux-mêmes les pansements et les aspirines dans les pharmacies. La population est complètement à bout. Quelque soit les habiletés politiciennes, ca reste des tempêtes dans un verre d'eau. Il n'y a pas de stabilité, ni de stabilisation possible quand le minimum d'une vie normale est interrompue.

Le Premier ministre donne l'impression de jouer au poker à coups de bluff...

- En fait, la situation est hors de contrôle. L'ensemble de l'Etat major de l'armée a été relevé de ses fonctions, d'une façon tout à fait brusque, le jour même de l'annonce du référendum. Cela indique bien une réaction de panique de l'Etat qui perd le contrôle de la situation. Contrairement à ce qu'on a pu dire, Georges Papandréou n'avait pas peur d'un coup d'Etat. Les chefs d'Etat major résistaient très vivement aux coupes dans les dépenses militaires. Il a donc amorcé une recomposition de paysage politique.

L'annonce d'un référendum faisait partie de ce début de recomposition ?

- Le calcul de Georges Papandréou avait quelque chose d'ambigüe. Aux abois, il avait besoin de quelque chose pour se redonner une légitimité minimale, quitte à être très offensif dans son geste. Il mettait au pied du mur ses adversaires pour les pousser à assumer les conséquences.

En ce sens, comme il s'en est félicité lui-même, Georges Papandréou a obtenu la clarification qu'il souhaitait de la part de l'opposition de droite, qui a jeté son masque. Il faut rappeler qu'il n'y avait pas de consensus entre les deux grands partis autour des mesures d'austérité décidées au niveau européen. L'opposition de droite avait une position ambigüe car elle n'a voté aucun des paquets d'austérité depuis le début de la crise. Aujourd'hui, elle les accepte. Georges Papandréou a aussi coincé la gauche radicale -qui monte dans les sondages autour de 25 % des voix-, en leur demandant si elle était prête à prendre le risque d'une rupture avec l'Union européenne.

La clarification politique lui a permis de constituer un bloc de consensus, tacite et explicite, plus large et qui lui permet de gagner du temps.

Le plan ne va pas au-delà d'un simple gain de temps ?

- Non. Les journalistes grecs qui ont interrogé les ministres le disent clairement. Il n'y a pas de plan derrière tout ça, si ce n'est de gagner du temps.

A qui profite cette crise dans le jeu politique interne ?

- Toutes les tentatives vont dans le sens d'une recomposition d'un bloc de force qui va assumer de façon ferme et musclée la mise en œuvre des plans d'austérité dictés par l'Union européenne. Ceux qui dans le Pasok remettent en cause l'autorité de Papandréou, le font pour trouver un consensus avec la droite, voire avec l'extrême droite. Cette dernière est vraiment la grande gagnante de cette crise. Le parti d'extrême droite a voté tous les plans d'austérité, il a été le meilleur soutien du gouvernement. Aujourd'hui, il consolide sa position. Il pèse de 6 à 8 % des voix et vont sans doute peser dans les prochaines élections

Il n'y aura pas de majorité absolue dans le prochain Parlement. La droite se maintient tout juste. Le paysage politique sera beaucoup plus éclaté avec 7 ou 8 partis. On va vers une liquéfaction du paysage politique, tout le contraire de ce qu'on a toujours connu.

Si la gauche radicale n'était pas aussi divisée, elle aurait pu constituer une solution de rechange. Avec les écolos, elle pèse plus que l'opposition de droite.

Que peut-il se passer maintenant ?

- Des nouvelles élections sont inévitables, même si dans un climat pareil, je vois mal comment une campagne peut se dérouler sereinement. Les responsables du Pasok (le parti socialiste au pouvoir) ne peuvent même pas traverser les rues s'ils n'ont pas une escorte policière conséquente.

La classe politique essaye de trouver des formules de transition qui vont permettre le vote par le Parlement actuel de l'accord du 26 octobre. Mais si le Pasok et la Nouvelle démocratie, même sans Georges Papandréou, arrivent à se mettre d'accord là-dessus, le gouffre entre les élus et la population n'apparaitra que plus clairement et s'accentuera.

Et les manifestations pourraient reprendre ?

- Ca me parait inévitable. Il n'y a pas de fatigue qui compte quand on n'a pas de quoi faire ses courses. La colère est énorme et peut prendre une forme aveugle. Il ne faut pas oublier que la population grecque n'est pas docile. C'est un chaudron. Une étape supplémentaire dans son explosion va inévitablement être franchie. Je ne sais pas sous quelle forme, je ne suis pas devin.

Interview de Stathis Kouvelakis, professeur de philosophie politique au King's College de Londres, spécialiste de la Grèce, par Sarah Diffalah.

(vendredi 4 novembre 2011)

Source : message reçu le 7 novembre 00h