thème : international
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mardi 19 juin 2018 à 16h

Discreet Violence :

L'architecture et la guerre française en Algérie

  • Du 19 au 14 juillet : Exposition
  • Mardi 19 juin 16h : Vernissage et colloque
  • Mercredi 4 juillet 19h : Discussion « Les déracinés de Cherchell »

Discreet Violence : L'architecture et la guerre française en Algérie est une exposition mise en place par la chercheuse Samia Henni. Présentée à Zurich et à Rotterdam ; elle n'avait jamais été montrée en France jusqu'alors.

La Colonie, de par sa place particulière dans le paysage culturel français et par son attention aux questions post-coloniales et de décolonisation, se devait de présenter Discreet Violence.

A cette occasion, elle porte le projet d'un ensemble de rencontres et de conférences autour de la militarisation et des espaces et des corps.

L'exposition Discreet Violence sera présente à la Colonie dès le 19 juin et sera doublée de réflexions sur la question de l'état d'urgence aujourd'hui en France, sur la continuité des pratiques architecturales militaires de l'armée française et sur la question des déplacements identitaires et mémoriels (19 juin) mais aussi sur les spoiliations induites par l'existence des camps de regroupement (4 juillet).

L'exposition

Pendant la Révolution algérienne (1954-1962) ou la guerre d'indépendance algérienne, les autorités civiles et militaires françaises ont profondément réorganisé le territoire urbain et rural de l'Algérie, transformé radicalement son environnement bâti, implanté rapidement de nouvelles infrastructures et construit stratégiquement de nouvelles implantations afin de protéger les intérêts économiques de la France en Algérie et de maintenir l'Algérie sous la domination coloniale française en place depuis 1830.

L'exposition Discreet Violence ne présente qu'un seul aspect de ces transformations territoriales: la construction de camps sous contrôle militaire baptisés par euphémisme « centres de regroupement » dans les zones rurales algériennes. Ces espaces résultaient de la création des zones interdites de libre feu et ont engendré le déplacement forcé et massif de la population algérienne. Des unités militaires spéciales, appelées Sections administratives spécialisées, ont supervisé l'évacuation des zones interdites, le regroupement de la population algérienne, la construction de camps temporaires et permanents, la conversion de plusieurs camps permanents en villages et la surveillance au quotidien de la vie des civils algériens. Le but de ce regroupement était d'isoler la population algérienne de l'influence des combattants de la libération nationale et d'entraver les soutiens psychologiques et matériels potentiels.

Le nombre exact de camps qui ont été construits pendant la guerre, le nombre de personnes ayant été forcées de quitter leurs maisons, ainsi que le nombre de villages dévastés, sont encore contestés à ce jour. En 1960, il a été estimé qu'il y aurait eu, 2 157 000 personnes déplacées de force. Une autre évaluation de 1961 a estimé qu'au moins 2 350 000 personnes avaient été concentrées dans des campements contrôlés par les militaires et que 1 175 000 autres personnes avaient été forcées de quitter leurs maisons en raison d'opérations militaires constantes et violentes, ce qui signifie que plus de 3,5 millions de personnes avaient été forcées, déplacées. Une autre estimation du 15 février 1962, quelques semaines avant l'indépendance de l'Algérie, indiquait que 3 740 camps avaient été construits en Algérie française depuis le déclenchement de la Révolution algérienne en 1954.

Basé sur des photographies militaires françaises et des films produits par les équipes de propagande du Service cinématographique des armées (SCA) et d'autres sources publiques et privées, l'exposition «Discreet Violence: architecture et guerre française en Algérie» présente certains aspects de l'évacuation de la population rurale algérienne, les processus de construction des camps et les conditions de vie dans les camps. L'exposition décrit la manière dont le régime colonial français a tenté de détourner les objectifs militaires des camps à la suite d'un scandale médiatique en 1959. L'exposition dévoile les relations intrinsèques entre l'architecture, les mesures militaires, les politiques coloniales et la production et la distribution planifiées d'enregistrements visuels. Aujourd'hui, le SCA s'appelle établissement de communication et de production audiovisuelle de défense (ECPAD) et est toujours actif dans les zones de guerre où l'armée française est impliquée.

L'exposition est organisée par le Dr. Samia Henni et produite par La Colonie et les expositions gta, ETH Zurich.

Le programme :


Mardi 19 juin - Vernissage et colloque

Table rondes - conférences - 16h à 18h :

Avec Léopold Lambert, Hassina Mechaï et Sihem Zine, Samia Henni

Bidonvilles : Alger, Paris : Samia Henni présentera les politiques de résorption des bidonvilles que les autorités coloniales françaises avaient appliquées à Alger durant le Révolution Algérienne (1954-1962) et leur exportation et mise en application à Paris, notamment à Nanterre. Elle parlera des rôles et du rapport entre les Sections administratives urbaines à Alger et la Société nationale de construction de logements pour les travailleurs algériens à Paris.

Le 17 octobre 1961 à Paris : histoire spaciale de l'état d'urgence français : Léopold Lambert s'arrêtera sur un épisode particulier de l'histoire spatiale de l'état d'urgence français qu'il tente de décrire dans son travail : celui du massacre du 17 octobre 1961 à Paris. Généralement connu de beaucoup comme un pic de violence ponctuel et localisé de la police parisienne à l'encontre des manifestant.e.s algérien.ne.s, cette présentation tâchera de démontrer qu'il s'agissait en fait d'un événement mobilisant une multiplicité d'espaces dans Paris et ses banlieues et de temporalités durant le mandat de Maurice Papon en tant que Préfet de la Seine (1958-1966) et l'état d'urgence (1961-1962).

L'état d'urgence (permanent) : Le 14 novembre 2015 était déclaré l'état d'urgence en France. Durant presque 2 ans, le pays a vécu sous un régime d'exception dérogatoire au droit commun. Diverses mesures pouvaient être prises par l'autorité administrative, de perquisitions en assignations, de fermeture de lieux de culte en interdiction de sortie du territoire. Le livre L'état d'urgence (permanent) écrit par Hassina Mechaï et Sihem Zine interroge cet état d'exception désormais de droit commun, depuis le 3 octobre 2017. A travers des témoignages de personnes touchées par ces mesures, d'interviews de juristes, philosophes, experts, ce livre esquisse un bilan de l'état d'urgence et ouvre une réflexion sur un changement de société qui s'est fait sans coup d'éclat juridique, mais de glissement imperceptible en glissement dangereux. Vers où l'état d'urgence mène-t-il ?

Biographies :

  • Samia Henni est architecte et maître assistante à l'École d'architecture de l'Université de Princeton aux États Unis. Elle travaille sur les intersections entre les pratiques coloniales, les opérations militaires, l'architecture et l'urbanisme. Elle est l'auteure de Architecture of Counterrevolution: The French Army in Northern Algeria (Zurich: gta Verlag, 2017) et commissaire de l'exposition Discreet Violence: Architecture and the French War in Algeria. Elle a obtenu son doctorat en Histoire et théorie de l'architecture (avec mention très bien) de l'ETH Zurich. Sa thèse a reçu la Médaille de l'ETH.
  • Léopold Lambert est architecte, chercheur et éditeur-en-chef de The Funambulist, une revue bimestrielle dédiée à des lectures spatiales de luttes décoloniales, antiracistes, queer et féministes dans le monde. Il est l'auteur de trois livres examinant la violence intrinsèque de l'architecture et son instrumentalisation politique : Weaponized Architecture : The Impossibility of Innocence (2012), Topie impitoyable : La politique du vêtement, du mur et de la rue (2015) et La politique du bulldozer : La ruine palestinienne comme projet israélien (2016). Son prochain livre s'appellera États d'urgence : Une histoire spatiale du continuum colonial français (2019).
  • Hassina Mechaï est journaliste. Juriste de formation, elle a notamment travaillé sur les questions de Libertés publiques et Droits de l'Homme. Journaliste, elle a travaillé pour divers médias français, africains et arabes. Elle collabore actuellement avec des publications internationales, notamment le Middle East Eye, Perspektif Mag, le Middle East Monitor ou encore Le Point. Ses domaines de réflexion sont essentiellement les questions internationales, les rapports Nord-Sud, le Softpower, le monde arabe et l'Afrique. C'est à la suite d'une enquète sur l'état d'urgence en France, au cours de laquelle elle a été amenée à rencontrer diverses personnes touchées par des mesures d'exception que l'idée de ce livre est née. Ce livre, tel qu'il a été envisagé, est une façon de poser, comme juriste et comme journaliste, les questions que l'état d'urgence soulève, et les dangers qu'il fait peser sur la société française et ses citoyens.
  • Sihem Zine a été humanitaire pendant une dizaine d'années sur des zones de conflits au Moyen-Orient (Israël-Palestine-Egypte). Elle a fondé l'ADM, Action droits des Musulmans, suite à la mise en place de l'état d'urgence, en novembre 2015. Elle coordonne l'aide à apporter aux victimes de mesures administratives (perquisitions ou assignations à résidence). Elle s'occupe de la stratégie juridique et contentieuse en lien avec des avocats spécialisés. Elle analyse les problématiques qui ont conduit à ces mesures d'exception comme la discrimination, le racisme et l'exclusion.

18h30

Vernissage de l'exposition et colloque


Mercredi 4 juillet - discussion « Les déracinés de Cherchell »

La Colonie invite à une rencontre et une discussion autour du livre, Les déracinés de Cherchell, autour de l'histoire des camps de regroupement avec Kamel Kateb (auteur), Yann Scoldio-Zurcher (historien à confirmer) et Dorothée Myriam Kellou (cinéaste et journaliste) qui présentera pour l'occasion les premières images de son documentaire L'Arrachement

Les déracinés de Cherchell : Entre 1954 et 1962, un quart de la population fut déplacé par les autorités militaires françaises et confiné dans des camps de regroupement pour détruire ce que les autorités françaises considéraient comme des soutiens aux groupes armés qui luttaient pour l'indépendance.

Coupés de leurs terres et de leurs moyens de subsistance, ces populations relativement pauvres, pour l'essentiel des femmes, des enfants et des personnes âgées, durent recréer de nouvelles vies dans ces camps de fortune. Ces déplacements ont constitué une rupture profonde dans les conditions d'existence de milliers de paysans algériens, bien au-delà de la période où ils furent enfermés dans ces camps.

Cet ouvrage reconstitue la trajectoire de certains témoins de la région de Cherchell qui ont subi ces déplacements forcés, et apporte, à travers cette série de récits, une pierre essentielle à l'édifice d'une mémoire souvent oubliée ou occultée.

Emportés collectivement dans les secousses de la guerre, ces femmes et ces hommes ont vécu, chacun à leur manière, des parcours qui les ont menés dans des directions différentes.
Les auteurs ont minutieusement récolté ces récits de vie, ces parcours cassés, qui malgré la douleur et l'arrachement ont pu, quelquefois, engendrer aussi de belles histoires.

Biographies :

  • Samia Henni est architecte et maître assistante à l'École d'architecture de l'Université de Princeton aux États Unis. Elle travaille sur les intersections entre les pratiques coloniales, les opérations militaires, l'architecture et l'urbanisme. Elle est l'auteure de Architecture of Counterrevolution: The French Army in Northern Algeria (Zurich: gta Verlag, 2017) et commissaire de l'exposition Discreet Violence: Architecture and the French War in Algeria. Elle a obtenu son doctorat en Histoire et théorie de l'architecture (avec mention très bien) de l'ETH Zurich. Sa thèse a reçu la Médaille de l'ETH.
  • Kamel Kateb est chercheur à l'Institut national d'études démographiques (INED). Ses recherches portent sur l'histoire des populations des pays du Maghreb, leur système éducatif et les migrations entre le Maghreb et l'Europe. Il a notamment publié Européens, « Indigènes » et Juifs en Algérie (1830-1962) (INED), Fin du mariage traditionnel en Algérie ? (1876-1998) (Bouchène). Il est aujourd'hui l'auteur Des déracinés de Cherchell.
  • Léopold Lambert est architecte, chercheur et éditeur-en-chef de The Funambulist, une revue bimestrielle dédiée à des lectures spatiales de luttes décoloniales, antiracistes, queer et féministes dans le monde. Il est l'auteur de trois livres examinant la violence intrinsèque de l'architecture et son instrumentalisation politique : Weaponized Architecture : The Impossibility of Innocence (2012), Topie impitoyable : La politique du vêtement, du mur et de la rue (2015) et La politique du bulldozer : La ruine palestinienne comme projet israélien (2016). Son prochain livre s'appellera États d'urgence : Une histoire spatiale du continuum colonial français (2019).
  • Hassina Mechaï est journaliste. Juriste de formation, elle a notamment travaillé sur les questions de Libertés publiques et Droits de l'Homme. Journaliste, elle a travaillé pour divers médias français, africains et arabes. Elle collabore actuellement avec des publications internationales, notamment le Middle East Eye, Perspektif Mag, le Middle East Monitor ou encore Le Point. Ses domaines de réflexion sont essentiellement les questions internationales, les rapports Nord-Sud, le Softpower, le monde arabe et l'Afrique. C'est à la suite d'une enquète sur l'état d'urgence en France, au cours de laquelle elle a été amenée à rencontrer diverses personnes touchées par des mesures d'exception que l'idée de ce livre est née. Ce livre, tel qu'il a été envisagé, est une façon de poser, comme juriste et comme journaliste, les questions que l'état d'urgence soulève, et les dangers qu'il fait peser sur la société française et ses citoyens.
  • Dorothée Myriam Kellou est journaliste et réalisatrice franco-algérienne basée à Paris. Elle est l'auteure d'une enquête dans le journal Le Monde sur le financement indirect de l'Etat islamique par Lafarge pendant la guerre en Syrie qui a été récompensé par le prix Trace International pour l'investigation journalistique. Elle développe l'Arrachement, un projet de film long métrage sur les regroupements de populations pendant la guerre d'Algérie, prenant pour point de départ la mémoire/l'oubli de son père. Le scénario a été récompensé par la bourse "Brouillon d'un rêve" de la SCAM, le premier prix du projet de film historique aux rendez-vous de l'histoire à Blois et le premier prix de l'atelier de premier montage du festival international des femmes du Caire.
  • Yann Scoldio-Zurcher est historien des migrations contemporaines, chargé de recherche au CNRS, investi dans l'axe de recherche « Israéliens et palestiniens : sociétés et cultures contemporaines ». Il étudie l'histoire sociale des migrations et des relations des olim à l'espace hiérosolymitain, de la fondation de l'État d'Israël à nos jours.

Un grand merci à Nadine Attalah, à Kader Attia, à Guus Beumer, à Michel Cornaton, à Lucas Erin, à Patricia Falguières, à Flora van Gaalen, à Alix Hugonnier, à Léopold Lambert, à Lucie Moriceau, à Niels Olsen, à Nataša Petrešin Bachelez, à Véronique Pontillon, Sabine Sarwa, Nadine Schütz, Pascal Schwaighofer, Daniel Sommer, Laurent Stalder, Philip Ursprung, Damien Vitry, Clément Willemin et Pierre Willemin.

Lien : https://paris.demosphere.net/rv/62677
Source : http://www.lacolonie.paris/agenda/discreet-vi…